Lettre à mon futur fils

Il y a quelques semaines, lors d’une écho quelque peu rocambolesque à cause du covid, j’ai appris une nouvelle extraordinaire : je vais avoir un fils !… Toi !

Pour me le faire découvrir (je dis « me » car ta maman a fermé les yeux, j’ai gardé la surprise pour son anniversaire), la gynéco a éclairé le plafond de son cabinet d’une couleur… bleue. « Pourquoi bleue, papa ? Les filles aussi aiment le bleu, non ? » Si tu me poses cette question un jour, j’aurai réussi quelque chose.

Cette nouvelle m’emplit de joie et, en même temps, d’une certaine fébrilité. Je vois les hommes, la société, le monde, je vois les violences faites aux femmes, j’entends les blagues graveleuses, les discours farcis de préjugés. Et je me dis : « Comment faire de toi un homme juste ? Un homme qui n’aura pas honte de pleurer, qui n’usera jamais de sa force physique pour imposer sa loi, qui veillera sur ses proches avec bienveillance et tendresse ? Serai-je à la hauteur de l’éducation que j’aimerais te donner ? »

Avant même la naissance, certains pères disent : « C’est bien mon fils ! » quand il donne un coup un peu fort dans le ventre de leur maman. Ils s’imaginent un futur tombeur, un casse-cou, un fan de petites voitures et de super-héros. Tu auras des petites voitures, ne t’inquiète pas. D’ailleurs ta sœur en a déjà. Mais tu auras aussi des poupons de qui prendre soin, des dinettes, et puis même des robes de princesse si tu veux t’habiller comme ça. Je ne veux rien t’imposer, mon fils. Mais je ne veux rien t’enlever non plus. Aucune possibilité d’être toi, juste toi, dans tout le faisceau de ta nature unique, que tu apprendras à explorer.

On dit qu’on apprend par l’exemple, plus que par les belles paroles. Alors je te donnerai l’exemple. Du moins, j’essaierai. Tu me verras aux fourneaux, les mains dans les toilettes et dans tes couches, tu me verras là, présent, un maximum, et tu comprendras, je l’espère, que c’est AUSSI la place de l’homme.

En attendant, ta place est au chaud dans le ventre de ta maman. Restes-y tant qu’il faudra, puis nous serons tous là pour t’accueillir.

Ton (futur) papa.