[Le jeu de l’amour et du bazar – scène III]

— Na.

— Moi je crois que si.

Papa se lève de son bureau, se dirige vers la chambre de bébé, ferme les rideaux.

— Tu viens chérie ? Tes doudous t’attendent.

Figée dans le salon, bébé observe la scène de loin.

— Na.

Elle remue la tête de gauche à droite.

— Bon, comme tu veux. Moi je suis très fatigué.

Papa s’allonge sur le tapis près du lit de bébé, qui ne tarde pas à le rejoindre.

— Bolom bolom papa, papapapa shut.

— Papa est très fatigué, il doit dormir. Est-ce que tu veux dormir avec lui ?

Bébé fait oui de la tête et s’allonge près de papa. Papa sourit, et respire l’odeur de ses cheveux bouclés.

— Tu serais quand même mieux dans ton lit, non ? murmure papa.

Bébé met un doigt devant sa bouche.

— Na, tacotaco, shuuuut, papapa.

— Oui, tu as raison, shut, il ne faut pas faire de bruit. Allez, tout le monde fait dodo maintenant.

Papa attrape bébé et la pose dans son lit. Un hurlement lui déchire aussitôt les tympans. Bébé sort du lit et retourne dans le salon.

— Je veux bien que tu joues dans le salon, mais il faut laisser papa tranquille quelques minutes. Il doit envoyer un fichier important.

— Aticoto papa, aticoto.

— Exactement. Quand papa aura fini de travailler, il jouera avec toi.

— Chhhhhhhhhat ?

— Oui, et on jouera avec le chat aussi.

Papa se rassied à son bureau, mais une petite main attrape aussitôt son ordinateur et le tire vers le vide. Papa le rattrape in extremis.

— Bon, ça suffit maintenant, papa doit travailler !

Papa élève le ton. Les yeux de bébé se mouillent de larmes, puis elle fond en sanglots.

— Pardon, pardon, papa n’aurait pas dû s’énerver. Viens faire un câlin ma chérie.

— Mama ?

— Maman, elle est dans la salle-de-bain. Elle fait une visio-conférence avec ses collègues.

Soudain, bébé baille et se frotte les yeux. Papa saute sur l’occasion et emmène bébé dans sa chambre. Il ferme la porte et s’assied avec elle sur le matelas.

— Veux-tu lire un petit livre avant de faire ta sieste ?

Bébé fait oui de la tête, se dirige vers sa bibliothèque et, après mûre réflexion, choisit un livre qu’elle apporte à papa.

— Voyons voir ce que tu as choisi !

Papa regarde quelques instants la couverture, puis regarde sa fille, qui s’est installée au creux de son bras.

— Tu es vraiment sûre que c’est celui-là que tu veux ?

Bébé fait oui de la tête.

— Bon très bien. Et papa se met à lire : « T’choupi ne veut pas se coucher… »